A la fin des années 60, l'Europe souhaite disposer d'un lanceur afin d'accéder à l'espace par ses propres moyens. Constituée à partir d'étages conçus dans plusieurs pays, la Europa s'avère être un désastre logistique et technique. Sur les quatre tentatives de mise sur orbite réalisées, aucune n'aboutira.
A la même époque, la France et l'Allemagne développent conjointement un programme de télécommunications qui comprend les satellites Symphonie 1 et 2. Ils souhaitent les lancer à l'aide d'Europa II depuis le Centre Spatial Guyanais. Les échecs répétés de la fusée les obligent à se tourner vers la NASA. Cette dernière se dit prête à les lancer à condition que les satellites restent au stade expérimental et qu'aucune exploitation commerciale ne soit prévue. Les Etats-Unis voyaient d'un mauvais oeil l'arrivée d'un concurrent à la compagnie Intelsat, majoritairement financée par l'Oncle Sam. L'offre est acceptée à contrecoeur. L'Europe ne tolère pas de pouvoir bénéficier de la manne financière que pourrait représenter l'exploitation commerciale des satellites de télécommunications. Raison qui la pousse à se remettre au travail pour garantir son autonomie de l'accès à l'espace.
L'Europe spatiale est en crise. Europa ne marche pas et plusieurs pays se désengagent du programme, les Etats-Unis dictent leurs conditions pour lancer les satellites européens, la NASA tente d'appâter l'Allemagne en lui proposant de participer au programme de sa navette spatiale. C'est dans cette ambiance morose que se déroule la Conférence Spatiale Européenne en décembre 1972. Alors que les spécialistes pronostiquaient l'échec des négociations, les pays européens s'accordent sur plusieurs sujets :
Le vol inaugural d'Ariane est repoussé une première fois le 15 décembre 1979 suite à un problème technique. Le 23 décembre, les caprices de la météo obligent à un nouveau report. Finalement, la belle Ariane prend son envol le 24 décembre 1979 avec succès. Un beau cadeau pour l'Europe spatiale qui agonisait depuis 10 ans. Ce vol d'essai est suivi par trois autres dont un échouera en mai 1980.
A l'époque où Ariane est conçue, les responsables du programme envisageait trois à quatre vols par an pour répondre aux besoins européens. Avec l'émergence de satellites de télécommunications, certains d'entres eux imaginent une carrière plus ambitieuse pour la fusée européenne. Ils souhaitent vendre des lancements à des clients étrangers. En mars 1980, Arianespace est créée pour répondre à ce besoin.
Ariane 1, c'est 1 850 kg expédiés sur l'orbite de transfert géostationnaire. C'est un peu juste si Arianespace veut lancer deux satellites de télécommunications en même temps, sachant que leur masse moyenne à l'époque était de 1 000 kg environ. C'est la raison pour laquelle l'ESA décide de développer Ariane 2 équipée de moteurs plus puissants ce qui porte la charge à 2 275 kg. Dotée de deux boosters à poudre, Ariane 2 devient Ariane 3 dont la performance orbitale est de 2 700 kg. Pour répondre au souhait de lancer deux satellites en même temps, une structure spéciale est conçue à cet effet. SYLDA est l'acronyme de SYstème de Lancement Double Ariane. La SYLDA, bien que déjà utilisée sur Ariane 1, a surtout été développée pour Ariane 3 dont le volume sous coiffe permettait de transporter 2 satellites. Le premier satellite est fixé sur la SYLDA, tandis que le second se trouve à l'intérieur.
La carrière des Ariane 1 à 3 aura été courte puisque ces versions de la famille Ariane auront été en service qu'une petite dizaine d'années avant de céder la place à Ariane 4.
Au début des années 80, l'Agence Spatiale Européenne entreprend le développement d'une fusée qui allait marquer l'actualité astronautique pendant quinze ans. Si lancer un satellite coûte cher, pourquoi ne pas en lancer deux en même temps ? Une étude du marché réalisée à l'époque montrait que dans les années 90, la masse moyenne des satellites de télécommunications avoisinerait deux tonnes.
L'idée était de partir d'un lanceur de base avec une capacité équivalente à celle d'Ariane 1, soit 1,9 tonne et d'adjoindre le nombre de propulseurs d'appoint nécessaire (0, 2 ou 4) pour atteindre les performances requises. Ces propulseurs sont soit à poudre (notés P) soit à ergols liquides (notés L). Six configurations d'Ariane 4 sont possibles : Ariane 40 est la moins puissante puisque dépourvue de boosters. Elle est spécifiquement utilisée pour les orbites basses. Ariane 44L est la plus performante avec ses quatre boosters à ergols liquides. Entre les 2, on retrouve Ariane 42P, 44P, 42L et 44LP.
Au cours de sa carrière, Ariane 4 a connu plusieurs modifications qui ont permis d'améliorer sa fiabilité (113 succès pour 116 vols) et d'accroître ses capacités. En 1989, Ariane 44L pouvait lancer une charge de 4,2 tonnes sur l'orbite de transfert géostationnaire. En 2003, ce même modèle lançait un satellite de 4,9 tonnes, soit un gain de 17 %.
Ariane 4 arrive sur le marché des satellites de télécommunications à une époque propice à son succès commercial. Les Etats-Unis, les rivaux de la fusée européenne, renoncent à l'exploitation commerciale de sa navette au lendemain de l'accident de Challenger. De plus, la stratégie du « tout navette » a conduit le pays à stopper ses chaînes de production des lanceurs classiques au profit de sa flotte de navettes. Les Occidentaux n'ayant plus d'autre choix possibles, ils se sont tournés naturellement vers le seul lanceur encore disponible pour lancer les satellites. Il faudra attendre le milieu des années 90 pour qu'Arianespace soit face à de la concurrence, notamment le tandem Atlas/Proton exploité par International Launch Service ou la fusée Zenit vendue par Sea-Launch. Malgré ces nouveaux venus sur le marché, Ariane maintient sa place de leader.
Au cours de sa carrière, Ariane 4 connaîtra deux évolutions de son troisième étage, en plus des petites améliorations régulières. La capacité d'emport d'Ariane 44L passera de 4,2 tonnes en 1988 à 4,9 tonnes lors de sa mise à la retraite en 2003.
En novembre 1987, les Ministres européens des pays membre de l'ESA adoptent un programme spatial d'envergure qui s'articule autour de la dernière née de la famille Ariane.
Fondamentalement différente des ses aînées, Ariane 5 est constituée d'une architecture proche de celle de la navette spatiale. Pour réduire les risques d'accident, le nombre de moteurs a été réduit au maximum. Il n'y en aura plus que 3, dont deux à propergols solides, contre 8 à ergols liquides pour Ariane 44L. Dès le départ, les responsables du programme ont souhaité atteindre un taux de fiabilité de 98,5 %, soit un échec tous les 75 vols. Parce que avec Ariane 5, ils voient très grand, trop grand même.
Ariane 5 ne sera pas uniquement le successeur désigné d'Ariane 4 pour le lancement des satellites en orbite géostationnaire. Elle sera la pierre angulaire d'un vaste programme habité européen. Lors de la Conférence ministérielle de 1987, il est décidé de développer l'avion orbital Hermès dans lequel embarqueront trois astronautes. Il effectuera jusqu'à deux vols par an pour desservir le laboratoire autonome européen Columbus ou la station spatiale internationale appelée Freedom voire même la station soviétique Mir 2. Le premier vol d'Ariane 5 est annoncé pour 1995 et celui d'Hermès pour 1997.
En 1992, la carte politique et économique change. L'URSS s'écroule en emportant avec elle les ambitions spatiales russes. En occident, c'est l'heure des restrictions budgétaires. Les premières victimes sont Hermès et le laboratoire autonome Columbus. Quant à la station russe Mir 2, elle est intégrée à Freedom pour devenir l'International Space Station dont la construction débute en novembre 1998.
Malgré le coup d'arrêt dans le rêve européen d'une autonomie en matière de vols habités, l'exigence de fiabilité d'Ariane 5 est maintenue. La confiance est telle qu'Arianespace est disposée à relancer un satellite perdu en cas d'échec une fois la fusée opérationnelle.
Le lanceur a souffert de débuts difficiles, avec deux échecs totaux et deux échecs partiels sur les quatorze premiers lancements. Pour le leader sur le marché commercial, il est inconcevable d'avoir un taux d'échecs aussi élevé pour une fusée réputée très fiable. Un programme de fiabilisation est entrepris au lendemain de l'échec vol 157 en décembre 2002.
Au fil des années, Ariane 5 va évoluer pour répondre aux besoins du marché. Différentes versions vont voir le jour, portant de 6 tonnes à 10 tonnes la capacité d'emport de la fusée européenne.
Ariane 5: Lanceur de base équipé d'un étage supérieur EPS et capable de placer sur orbite de transfert géostationnaire une masse de 5,9 tonnes ou 20 tonnes sur orbite basse.
Ariane 5G: Ariane 5 qui a subi une cure d'amincissement dans le cadre du programme « Perfo 2000 ». Les allègements concernent les structures mais aussi le système de lancement double ce qui autorise le lancement d'une charge de 6,8 tonnes.
Ariane 5G+: Ariane 5G améliorée, notamment avec un étage EPS transportant 300 kg d'ergols supplémentaires. Il s'agit plus d'un lanceur de transition qui n'a été utilisé qu'à trois reprises, dont celui du lancement de la sonde Rosetta.
Ariane 5GS: C'est une version d'Ariane 5ES dont l'étage EPC est équipé d'un moteur Vulcain 1.
Ariane 5ES: L'étage EPC est remplacé par celui d'une nouvelle génération équipé d'un moteur Vulcain 2. La quantité du propergol solide des EAP a été augmentée afin d'accroître la poussée. L'étage EPS a subi quelques modifications afin qu'il puisse répondre à certaines exigences notamment des allumages multiples en vol du moteur Aestus. Version utilisée pour le lancement du ravitailleur HTV ou des satellites Galileo
Ariane 5EC-A: Il s'agit d'une Ariane 5ES dont l'étage EPS est remplacé par un EC-A (Etage Cryogénique . La capacité d'emport passe à 10 tonnes sur l'orbite de transfert géostationnaire.
Sources