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Destination Orbite
Constellation de satellites Galileo
Photo ESA/P. Carril

Vers une indépendance européenne

01-01-2017 (Màj: 01-01-2017) Philippe Volvert

Un intérêt européen pour la géolocalisation

Dans les années 90, l'Agence Spatiale Européenne, l'Union Européenne ainsi que Eurocontrol ont compris l'intérêt de posséder un système de localisation par satellites. Ensemble, ils étudient un projet baptisé GNSS (Global Navigation Satellite System) qui doit se décomposer en deux phases:

  • Phase I : la première génération du système doit être basé sur les signaux reçus du GPS et GLONASS et les augmenter via le système EGNOS, similaire au système américain WAAS (Wide Area Augmentation System) et japonais MSAS (Multi-functional Satellite Augmentation System) utilisé pour la navigation aérienne
  • Phase II : la seconde génération du système peut fournir des services pour les utilisateurs civils sous un opérateur civil. Galileo est la contribution européenne à ce système.

EGNOS, premier pas européen

Le premier système que l'Europe a mis en place est EGNOS (European Geostationary Navigation Overlay Service). Il est basé sur trois satellites placés sur l'orbite géostationnaire ainsi que plus d'une trentaine de stations au sol qui assurent un service ouvert et utilisable par tous en améliorant les signaux des satellites GPS et GLONASS et un service à information garantie pour la navigation aérienne en Europe.

Le 15 juin 1999, l'Agence Spatiale Européenne signe un contrat avec Thales Alenia Space pour le développement d'EGNOS. Huit mois plus tard, les premiers signaux sont émis via deux satellites Inmarsat III dans le cadre du programme ESTB (EGNOS System Test Bed). Le test a été particulièrement concluant puisque les utilisateurs ont pu déterminer leur position à quelques mètres près alors que la précision des systèmes GPS et GLONASS n'est que d'une vingtaine de mètres. A cette date, il manquait encore le satellite ARTEMIS de l'Agence Spatiale Européenne pour compléter le réseau satellitaire et le rendre opérationnel. Après sa mise sur orbite dégradée par Ariane 5 en juillet 2001, il faudra 18 mois au centre de contrôle pour récupérer la situation. Finalement, en février 2003, ARTEMIS rejoint son poste de travail et quelques mois plus tard, EGNOS émettait ses premiers signaux.

La revue d'aptitude aux opérations initiales réalisée courant de l'été 2005 permet le transfert des opérations du système du consortium industriel mené par Thales Alenia Space à l'ESSP (European Satellite Services Provider), organisme chargé du démarrage de la phase pré-opérationnelle, c'est-à-dire non certifiée par l'aviation civile. Pour obtenir cette certification, des tests doivent être réalisés, ce qui sera chose faite l'année suivante sur l'aéroport de Valencia en Espagne non équipé de balises ILS (Instrument Landing System) d'aide à l'atterrissage. Le 01 octobre 2009, le service EGNOS est ouvert au public et aux entreprises et la certification pour l'aviation est obtenue en juillet 2010.

Galileo, le système européen de géolocalisation

La Phase II du projet GNSS est sans conteste la plus importante puisqu'elle concerne la mise en place d'un système de positionnement par satellites équivalent au GPS américain ou au GLONASS russe. Le projet a été présenté pour la première fois en 1998 lors d'un forum sur la stratégie européenne pour un système global de navigation par satellites. Il est approuvé lors du Conseil de Ministres de l'Agence Spatiale Européenne de mai 1999 sous la dénomination GalileoSat suivi un mois plus tard par le Conseil transports de l'Union Européenne. En novembre 2001, les Ministres attachés à la politique spatiale des pays membres de l'ESA se réunissent et approuvent le développement de Galileo pour un montant de 550 millions d'euros. Le Conseil transports de l'Union Européenne en fera autant en apportant une enveloppe de 450 millions d'euros. Reste à définir les modalités, c'est-à-dire les pays qui souhaitent participer au programme, l'apport financier que chacun souhaite apporter, les industriels et l'opérateur qui sera chargé de l'exploitation du système. Le coût global de Galileo était estimé à 3,4 milliards d'euros comprenant une participation du secteur public à la phase de développement et de validation pour un montant de 1,1 milliard d'euros réparti entre l'Union Européenne et l'Agence Spatiale Européenne. En 2005 ce montant a été réévalué à 1,5 milliard d'euros. En avril 2008, le Parlement Européen accepte de financer le montant restant.

La mise en place de Galileo ne se fera pas sans mal. Des divergences au sein des pays impliqués dès le début du projet provoqueront de nombreux retards. Les divergences portaient notamment sur le choix d'un consortium pour l'exploitation des satellites, sur le leadership sans compter la réaction des Etats-Unis qui ne souhaitaient pas voir apparaître un réseau concurrent aux performances supérieures. En effet, Galileo est un projet civil, global et sans restriction contre un projet militaire, limité dans certaines régions dans le monde. L'une des préoccupations des Etats-Unis était que des ennemis puissent utiliser Galileo pour frapper le pays sur ses propres terres. L'Europe a noté l'opposition américaine sans toute fois modifier ses plans, il en va de l'indépendance européenne. N'ayant pas réussi l'annulation du projet, les Etats Unis signent un accord d'interopérabilité entre les deux systèmes. L'enjeu est vital pour l'Europe d'autant plus que les applications de la localisation par satellites se multiplient et qu'elle ne veut pas être absente d'un marché qui promet d'être juteux. De la période 2000 - 2005, le marché mondial annuel des services et des équipements est passé de 1 à 20 milliards d'euros et continue de s'accroître de manière exponentielle. Au fil du développement, des pays ont montré leur intérêt au programme Galileo. La Chine s'est engagée à financer à hauteur de 200 millions d'euros. D'autres pays ont suivi ou sont en pourparler pour faire partie d'un projet qui devient international.

Galileo a été taillé pour répondre à 5 gammes de services :

  • Open Service est un service libre d'accès et gratuit permettant la localisation au mètre près. Il s'adresse à monsieur tout le monde (voiture, GSM et autres)
  • Commercial Service est plus restreint et crypté. Moyennant une redevance, il est possible d'avoir accès à ce service pour des applications spécialisées. La précision est de l'ordre du centimètre
  • Safety of Life Service informe automatiquement les utilisateurs en cas d'anomalie sur le réseau, notamment sur les satellites. Il est destiné aux applications critiques sur le plan de la sécurité (véhicules terrestres, marins et aériens)
  • Public Regulated Service est crypté et est destiné au service public comme par exemple le secteur de la sécurité, le domaine de la répression, les infrastructures stratégiques (énergie, finances, télécommunications autres)
  • Search and Rescue Service fait le lien entre l'émetteur du signal de détresse et les secours.

Avant d'installer un système de géolocalisation pleinement opérationnel, il est primordial de tester toutes les technologies développées dans le cadre du programme. Cela va des satellites aux installations au sol. Dans cette optique, deux satellites GIOVE (Galileo In-Orbit Validation Element) ont été commandés aux industriels européens et lancés respectivement le 28 décembre 1995 et le 27 avril 2008. La durée de vie optimale pour ces satellites était de deux ans.

Réseau Galileo
Illustration des différents plans d'orbite du système de géolocalisation européen Galileo - Photo ESA/P. Carril (Agrandir)

Le programme Galileo se découpe en deux phases bien distinctes, à savoir IOV (In-Orbit Validation) et FOC (Full Operational Capability).

La première consiste à tester à échelle réduite le réseau via 4 satellites Galileo IOV (In-Orbit Validation) à lancer par paire à partir d'octobre 2011. Ces satellites, d'une masse de 700 kg au décollage, sont construits par Astrium GmbH avec la collaboration de Thales Alenia Space Italie. Ils circulent sur une orbite de 23 222 km inclinée de 56°. La durée de vie optimale est de 12 ans.

La seconde doit comprendre 30 satellites (27 en service + 3 en réserve) placés sur une orbite culminant à 23 222 km inclinée de 56° sur 3 plans. Les 14 premiers satellites seront construits par l'allemand OHB-System AG pour un montant de 566 millions d'euros qui seront lancés par Soyuz par paire ou le cas échéant par Ariane 5 par grappe de 4 à partir de 2012. Le système sera placé sous la direction de Spaceopal, consortium constitué entre l'allemande DLR Space Applications Company Gmbh et l'italienne Telespazio S.p.A.

Sources