Le vol inaugural de la fusée japonaise H3, conçue pour succéder à H-IIA et H-IIB, a connu un échec dans la nuit de lundi à mardi lorsque le moteur de son deuxième étage ne s'est pas allumé cinq minutes après le décollage. Cette défaillance a entraîné la perte de la fusée ainsi que du satellite d'observation de la Terre ALOS 3 qu’elle transportait.
Après une première tentative de lancement avortée à la dernière seconde le 16 février dernier, la fusée H3 était à nouveau prête à entrer en service. Le compte à rebours s’est déroulé sans incident, conduisant à un décollage à l’heure prévue. Propulsée par s’est 6 910 kN, H3 s’est arrachée de son pas de tir YLP-2 au centre spatial de Tanegashima à 01:37:55 UTC.
Environ deux minutes après le décollage, les deux boosters à poudre ont été largués, alors que la fusée se trouvait à environ 45 km d'altitude et filait à une vitesse de 6 800 km/h. Une minute plus tard, la coiffe a été larguée, dévoilant le satellite japonais ALOS 3. Quelques instants plus tard, la fusée a effectué son changement de cap conformément au plan de vol, en utilisant la manœuvre « dogleg » pour éviter de survoler une zone habitée. Cette manœuvre est souvent utilisée par le Japon lorsqu'il vise une orbite à forte inclinaison depuis son territoire.
L’ascension s’est poursuivie jusqu’à l’extinction des deux moteurs LE-9 du premier étage un peu moins de 5 minutes après le décollage. Equipé d’un moteur LE-5B-3, le deuxième étage de la fusée devait prendre le relai 20 secondes plus tard. C’est à ce moment précis que les données de vitesse affichées sur le webcast de la JAXA ont commencé à indiquer une perte d’accélération après avoir atteint 13 000 km/h.
Dans un communiqué, l’agence spatiale japonaise a indiqué que « le moteur du deuxième étage ne s'étant pas allumé, il n'y avait aucune chance d'atteindre l'orbite spécifiée ». La commande de neutralisation de la fusée a été envoyée un quart d’heure après le décollage. Les débris de la fusée et du satellite ALOS 3 sont retombés dans une zone éloignée de l'océan, à plusieurs centaines de kilomètres à l'est des Philippines.
La JAXA a annoncé la création d’un groupe de travail, mené par le président Hiroshi Yamakawa, qui devra déterminer les causes exactes de l’accident et émettre une série de recommandations avant une reprise des vols le plus rapidement possible.
H3 est le nouveau lanceur que le Japon espère mettre en service rapidement. Il est destiné à remplacer les H-IIA et H-IIB, datant du début des années 2000 et coûtant relativement chers.
La fusée H3 s’articule autour d’une version standard constituée de deux étages cryogéniques. Selon la version, le premier étage est équipé de 2 ou 3 moteurs LE-9, chacun développant environ 1 200 kN de poussée (indiqué dans le premier chiffre entre parenthèses). A cet étage, 0, 2 ou 4 boosters à poudre peuvent être ajoutés (indiqué dans le deuxième chiffre entre parenthèses). Le deuxième étage, commun à toutes les versions de H3, est équipé d’un moteur LE-5B-3 développant une poussée de 138 kN. Au sommet du lanceur se trouve la charge utile, protégée par une coiffe. Deux modèles ont été développés : une courte (S) ou une longue (L).
La capacité d’emport de H3 varie entre 3,5 tonnes et 6,5 tonnes vers l’orbite géostationnaire selon la configuration du lanceur.
La fusée H3 a été conçue par la JAXA et Mitsubishi Heavy Industries pour effectuer une large variété de missions japonaises, notamment le lancement de satellites scientifiques, pour les applications terrestres, de renseignements et de sécurité nationale, ainsi que du nouveau vaisseau de ravitaillement HTV-X vers la station spatiale internationale ou encore la future Gateway.
La mise en service de H3 la nuit dernière devait être l’aboutissement d’une longue phase de développement qui n’aura pas été de tout repos pour les ingénieurs et techniciens japonais.
Au cours de ce lancement, la fusée H3 devait placer sur orbite le troisième satellite de la série ALOS (Advanced Land Observation Satellite). Il s’agit d’un satellite de télédétection équipé d'un capteur multispectral fonctionnant dans le visible et le proche infrarouge. Il devait fournir des images de la Terre offrant une résolution de 0,8 mètre en mode panchromatique ou 3,2 mètres en mode couleurs.
Les images en haute définition de l’ensemble du globe devaient servir pour la cartographie et la surveillance de l'environnement côtier et végétal. Mais ALOS 3 devait également être un outil essentiel pour aider les autorités dans la gestion des catastrophes.
Il était prévu d’injecter ALOS 3 sur une orbite héliosynchrone 17 minutes après le décollage à 675 km d’altitude. Sa durée de vie optimale était de 7 ans.
Sources
